Les repas à la table des Emier étaient rarement très animés. Le silence régnait dans l'immense demeure et seul bruit qu'on entendait était le cliquetis des ustensiles. Ils se glissaient parfois quelques mots par politesse, mais les seules moments qu'ils partageaient se déroulait généralement dans un calme presque horrifiant. « On m'a raconté que tu passais beaucoup de temps dans les quartiers cendres et je ne te mentirais pas en te disant que j'apprécie ce type de comportement. » Ellyrion fixa le visage de sa mère pendant un instant. Visage, qui lui était presque étranger maintenant qu'elle était toujours absente, toujours ailleurs, perdu dans ses projets futiles et sans intérêts. « Ils sont au moins cents fois plus sympathiques que la totalité des Perles. Ils ont des véritables préoccupations comparativement à toutes ses fausses bonnes âmes qui peuplent nos quartiers. » Rien n'était plus vrai. Il n'appréciait pas vraiment la compagnie des autres Perles qu'il jugeait trop trop snobs, trop égocentrique. Il ne les aimait pas autant qu'il aimait les Cendres et leur folle capacité à survivre contre l'impossible. Les Perles avaient tout, mais ne faisaient jamais rien. Les Cendres n'avaient rien et faisaient tout. C'était pour lui la véritable ingéniosité humaine. « Qu'est-ce que tu attends pour t'expliquer, jeune homme? » Il n'avait rien à expliquer, rien à nier. Il aimait la présence des Cendres plus que celles des ''siens'' et il n'avait franchement aucunement honte.Il se leva pour ramasser son assiette. Sa mère lui lançait un de ses regards plein de reproches. « Ils ne sont pas comme nous, Ellyrion. » Le jeune homme laissa tomber ses couverts sur le sol et asséna un coup de poing sur la table. Elle ne comprenait donc rien du tout ? « Personne n'est comme moi. » répliqua-t-il en fronçant les sourcils. Il pris un respiration profonde mais il ne semblait pouvoir se retenir comme d'habitude. « J'suis un bâtard. » Il ne trouvait pas d'autres mots pour illustrer la situation. Un bâtard, une erreur, une mélange contre la nature. Depuis qu'il avait découvert ses véritables origines, qui était vraiment son père, il se voyait comme un outsider, comme un être à part. Il ne voyait pas comment il pouvait se comparer à qui que ce soit. Son sang était impur, il n'était plus rien si qui que ce soit le découvrait. Et maintenant, sa peur des Pacificateurs ne pouvait que s'agrandir. Il allait devoir cacher toutes informations sur sa famille. « Quels propos honteux! Ne dit pas ce genre de chose, voyons. » s'indigna Madame Emier.